Au parlement

 

Ursula Von der Leyen face à la stratégie vaccinale

 

Depuis le début de l’année, la mise en place de la stratégie vaccinale européenne et sa déclinaison au niveau des Etats-membres agitent les esprits et posent de nombreuses questions. Cette semaine, la Présidente de la Commission européenne Ursula Von der Leyen a été obligée de s’expliquer devant le Groupe des Socialistes et Démocrates. En cause, la bourde présidentielle sur les exportations au Royaume-Uni mais plus globalement ce sont les retards de production des vaccins qui attisent les critiques.

 

Pourtant, je veux dire que j’appuie l’approche européenne qui a été mise en place : la démarche communautaire était la bonne stratégie à suivre. L’Union européenne a servi de levier politique et a permis d’éviter les concurrences entre Etats riches -mieux à même de se procurer rapidement des vaccins- et ceux qui le sont moins.  Sans cette approche nous serions sans doute en train d’éprouver de vives tensions intracontinentales. Mais cela n’empêche en rien d’enquêter pour savoir si la Commission a correctement managé la négociation avec les laboratoires.

Cependant, les choses ont pris un mauvais tournant et j’ai insisté à plusieurs reprises sur notre responsabilité politique d’agir contre l’hystérisation du débat. Evitons les fake news, évitons d’agiter les peurs et expliquons ! C’est ainsi que nous pourrons gagner la bataille de l’opinion publique. N’oublions jamais que nous parlons de vies humaines.

Cette démarche d’explication passe d’abord et nécessairement par la transparence et la publication complète des contrats signés avec les laboratoires. Aux arcanes du droit commercial, la responsabilité morale et sociétale des industriels s’oppose. Les enjeux économiques autour de ces vaccins sont colossaux mais l’opinion publique est en attente d’information.

Ensuite, il faut obtenir tous les éléments budgétaires sur le financement des vaccins. Aujourd’hui, rien n’est très clair : les financements proviennent-ils de l’enveloppe des 2,7 milliards d’euros de l’instrument d’aide d’urgence ? Pour quelle action ? Quelle est la répartition entre les laboratoires ? Les Etats membres ne sont-ils appelés que pour l’achat des vaccins ? Dans ce domaine aussi la confiance se construit.

A cet égard, montrons-nous exigeants envers les laboratoires : la notion de « best effort » revendiquée par AstraZeneca n’est pas substituable à l’obligation de résultats, afin de justifier de n’avoir pas fourni le nombre de doses escomptées. Les laboratoires doivent tenir leurs engagements de production et respecter leurs obligations contractuelles ; c’est sans alternative.

Au plan français, la stratégie commerciale de Sanofi fait réfléchir avec son « coup de poker » de mai quand le laboratoire affirmait avoir passé un accord avec l’administration Trump pour une livraison prioritaire du public américain. Ceci lui a permis d’être inclus parmi les partenaires de négociation de l’UE. Mais huit mois plus tard, Sanofi a échoué, au moment où un fournisseur supplémentaire aurait été appréciable. Comment ne pas voir dans cet « exemple », humiliant pour notre pays, l’effet des choix de maximisation des dividendes pour les actionnaires de Sanofi et de désinvestissement de ses outils en Europe ?

Plus largement, se pose la question des dépendances de l’Union européenne vis-à-vis des pays tiers. La survenue de la pandémie en mars dernier nous l’avait cruellement démontré : nous devons réinvestir dans les secteurs de production de produits pharmaceutiques afin de développer une autonomie stratégique de l’UE dans le domaine de la santé sous peine, à défaut, de devoir faire face à des pénuries dangereuses.

Au final, la Commission joue ici sa crédibilité. Si on peut louer la démarche d’unité, je regrette dans les faits une approche juridico-commerciale hors-sol qui est passée à côté de certains indices sur le plan de la recherche et des capacités industrielles réelles.

Ursula Von der Leyen face à notre groupe est restée évasive sur de nombreux sujets, comme également sur les licences et brevets, ou la notion de vaccins comme bien commun.

Il est urgent de redresser la barre : certains gouvernements commencent déjà à se désolidariser ; que dire de l’adhésion des citoyens ?

Sylvie Guillaume

Publié le 4 février 2021 à 14h02


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